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Superman, Identité Secrète

Superman, Identité Secrète : 3 Avis

S'il y a bien un super-héros qui me gonfle habituellement, c'est ce boy-scout de Superman. Je le supporte bien au sein de la JLA (Justice League of America) car les autres héros apportent la réflexion, le cynisme et l'humour dont il est dépourvu. Par contre, dans ses aventures solo, le seul intérêt pour moi est quand il est opposé à Lex Luthor et ses plans inventifs. Or ici, pas de Batman pour réfléchir, de Flash ou de Plastic Man pour détendre l'atmosphère, de Green Lantern pour utiliser ses pouvoirs de façon originale ou de Lex Luthor pour ourdir des plans de conquête ou de destruction. Enfin, Lex est présent, mais juste dans une histoire annexe présente un peu comme un bonus à la fin du deuxième tome. A priori, pas de raison que je m'intéresse à ce titre. Si au moins j'avais su qui était Kurt Busiek, l'excellent scénariste d'Astro City qui n'était pas encore disponible en VF à l'époque de ma première lecture d'Identité Secrète. Non, ce qui m'a fait me pencher sur ce titre, c'est sa reprise par Panini Comics. Sortir le second volume de cette mini-série débutée par Semic a été pour moi le signe que le titre devait présenter un minimum d'intérêt. Je n'ai pas été déçu.
Le Superman décrit ici est humain avec des préoccupations, des joies et des peines humaines. Du coup, pas besoin d'autre personnage hors norme pour pousser à continuer la lecture. Autant le Superman habituel est trop lisse pour être crédible, autant le Clark Kent d'Identité Secrète paraît tout a fait réel, ce qui permet de s'identifier à lui. Il ne voit pas la vie en noir et blanc, mais dans toute une palette de gris. Il pense d'abord à lui et pas au reste du monde, ce qui ne rend pas nécessaire le recours à des super-vilains venant contrebalancer ses vues. Etant présenté comme un humain, le confronter à d'autres humains suffit à rendre l'histoire intéressante.
Les questions qu'il se pose ne sont pas à des années-lumière de celles que ce pose tout un chacun. Se succèdent tour à tour les interrogations sur le fait de vivre avec un nom pas facile à porter, la solitude, l'envie de réussir, les préoccupations matérielles, ...
Avoir un héros avec des super-pouvoirs vient renforcer le propos, mais même avec un personnage ordinaire, l'histoire aurait tenu la route. Les super-pouvoirs illustrent la question de la différence et de son acceptation par soi aussi bien que par autrui. Comment serait traité un tel prodige s'il était parmi nous ?
Comment vivre avec un tel secret, qu'en faire et surtout comment l'annoncer à ses proches ?
Les réponses apportées sont en accord avec la personnalité qui est dépeinte, un Clark plutôt solitaire, détestant attirer l'attention et pesant longuement le pour et le contre avant de prendre ses décisions, ce qui fait que les autres possibilités sont également abordées.
C'est surtout le bon côté des super-pouvoirs qui est présenté, la possibilité d'abus restant en arrière-plan pour bien montrer que tout dépend de la personnalité de celui qui les possède et de son état d'esprit.
L'histoire est racontée par Clark qui livre a posteriori ses réflexions sur ses préoccupations et ses agissements, un peu comme un journal intime.
Il s'installe donc rapidement une complicité avec le personnage grâce à ce partage constant. Le héros est là pour aider, mais jamais pour régenter la vie des gens, ce qui achève de l'éloigner du stéréotype habituel.
Une autre force de la mini-série est son découpage en quatre parties présentant chacune une partie de la vie Clark Kent.
D'abord l'adolescence avec sa difficulté à se faire des amis, ses interrogations sur l'origine de ses pouvoirs et la façon dont il vit les changements qui s'opèrent en lui. Doit-il révéler au monde ses pouvoirs ou les cacher ? Ensuite l'âge adulte, avec le début de sa vie active et la rencontre de la femme de sa vie. Après vient la paternité et les inquiétudes qu'elle provoque. Enfin, la vieillesse et les nouveaux changements qu'elle amène.
Ce découpage montre un personnage qui évolue et non une icône gravée dans le marbre, ce que ne permet pas de faire une série régulière dont le but est de garder le héros tel quel pour ne pas perdre le lectorat en cours de route.
L'effet de réalité est renforcé par les dessins de Stuart Immonen. Les visages sont très travaillés et rendent un peu comme des photos.
De même pour les décors vus de haut qui sont impressionnants. Ces paysages sont l'occasion de faire des pauses dans la lecture, tout comme le héros qui s'arrête pour prendre le temps de la réflexion. Un bon moyen pour renforcer l'immersion dans le récit et oublier le reste.

En résumé, voici une histoire originale et prenante avec un héros tout en nuances et loin de stéréotypes habituels.
L'occasion de prendre le temps de rêver et de réfléchir en lisant une histoire de super-héros.
L'occasion peut-être aussi pour ceux qui sont habituellement rebutés par le genre de lire ce type d'histoire, ne nécessitant pas ici de connaître toute la continuité de l'univers DC pour comprendre ce qui se passe.


Note : 16.

Shikata ga nai

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