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Interviews : Interview Patrick Abry pour Xiao Pan

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Interview réalisée lors de Japan Expo 2007, le samedi 7 juillet 2007 (lire le compte-rendu).

Notre rencontre avec Patrick Abry, fondateur de Xiao Pan, nous a permis d'en découvrir un peu plus sur la bande dessinée chinoise, en France et en Chine.

yadana, pour TSD : Est-ce que vous pouvez nous présenter votre maison d'édition en quelques mots ?

Patrick Abry : La particularité de notre maison d'édition, c'est qu'elle est aujourd'hui la seule à être concentrée sur les publications d'auteurs chinois. On ne présente que des auteurs chinois et principalement de Chine continentale, et presque aussi principalement des auteurs de la jeune génération, c'est-à-dire des gens qui ont entre 20 et 32 ans, des gens qui n'ont pas trop le poids de la censure, pas le poids de la Révolution Culturelle sur les épaules, une jeune génération qui est vraiment très très talentueuse.

Ce qui ne vous empêche pas quand même de publier des choses un peu plus classiques.

La Belle du temple hantéOn publie des choses plus classiques au point de vue graphismes. On a aussi un auteur aujourd'hui, Nie Chongrui, qui est lui de l'ancienne génération. Il a 62 ans. Il a fait deux albums chez nous, et est en train d'en faire un troisième. On aura d'autres dessinateurs de l'ancienne génération avec lesquels on est en contact aujourd'hui. On essaie de voir si on pourrait les publier.
On a aussi dans l'idée de publier des vrais classiques, alors que les oeuvres de Nie Chongrui n'ont pas été publiées en Chine. Mais ce qu'on cherche surtout, c'est montrer la diversité de ce groupe d'artistes chinois, en sachant que la bande dessinée chinoise aujourd'hui n'est même pas considérée comme un art, alors que les arts graphiques ont toujours été bien considérés en Chine. La bande dessinée en Chine est un peu aujourd'hui dans l'état dans lequel était la bande dessinée en Europe à la fin des années 50, donc publications réservées à la jeunesse, censure, mauvaise image de marque, bouquins de qualité moyenne, etc.

Et c'est en train d'évoluer positivement ?

Oui, c'est en train d'évoluer. Il faut savoir que la bande dessinée, telle qu'on la connaît nous avec les cases, les bulles, tout ça, existe en Chine depuis 1993. Ca fait même pas 15 ans, donc c'est très très jeune, et tous ces gens qui ont grandi avec, qui étaient jeunes à cette époque-là et qui maintenant sont ados, voire adultes, ont envie d'avoir une bande dessinée un peu plus évoluée qui s'adresse à eux. Sur le marché chinois, il n'y a absolument rien aujourd'hui. Par contre, il y a des artistes qui eux aussi ont envie de raconter leur histoire, de raconter quelque chose d'un peu plus fort, mais il n'y a pas d'éditeur pour les publier en Chine, parce que le monde éditorial appartient à l'état à 100 %. Il y a un peu moins de 600 éditeurs en Chine, alors qu'il y en a 9 000 en France : il y a donc un vrai décalage. Le monde de l'édition est complètement contrôlé par l'état, donc il n'y a pas d'éditeur spécialisé BD, ça n'existe pas.

Donc du coup, vous avez cherché vous-même les auteurs.

Alors, au début, on est allés les chercher. C'était vraiment de notre propre initiative, et les gens n'étaient pas habitués à une telle démarche. Maintenant, dans le monde de la bande dessinée chinoise, tout le monde a entendu parler de Xiao Pan. Ils se sont passé le mot et ce sont les auteurs qui sont publiés chez nous qui en parlent à leurs copains, qui en parlent à leurs copains. Il y a eu beaucoup de publicité en Chine, on a participé à plusieurs salons en présentant ce qui est publié en France. Maintenant, on est connus en Chine et les projets arrivent d'eux-mêmes. Il est rare que j'aie à demander à mes partenaires chinois de me trouver un auteur, parce qu'en général ils sont déjà venus me voir.

Dr ForlenQuand vous publiez un auteur, vous essayez de continuer à publier ses autres oeuvres ?

Effectivement, il y a des auteurs dont on publie des oeuvres qui existaient déjà en Chine. C'est le cas de Benjamin, par exemple, puisqu'on a commencé avec lui. Remember et One Day sont des albums publiés en Chine. Par contre, Orange n'est pas publié en Chine, parce que son éditeur l'a refusé à cause du contenu un peu trop sombre (c'est une histoire de suicide). Mais il y a d'autres auteurs qu'on publie qui n'ont jamais été publiés en Chine, parce que ce n'est pas dans le mouvement, ce sont des bandes dessinées qui sont trop adultes. Donc, il y a des albums, par exemple un des derniers à être sorti chez nous, Dr Forlen, qui ne sortiront pas en Chine avant de nombreuses années... Et c'est un peu dommage, parce que, niveau graphique, il y a beaucoup de jeunes qui ont du talent.
Donc nous, on s'attache surtout à montrer ce que nous estimons être le mieux dans le monde graphique chinois, sachant que la bande dessinée chinoise - pour moi aujourd'hui et pour ceux qui la connaissent maintenant - a un handicap certain : les auteurs ne sont pas habitués à raconter des histoires et à bien les raconter, à bien les structurer, parce que ça fait pas partie de leur culture, ça ne fait pas partie des choses qu'on leur apprend. Autant on leur apprend à bien dessiner, autant on ne leur apprend pas à construire une histoire, et la BD chinoise pèche un petit peu du côté des histoires. On est en train de développer des projets communs avec des scénaristes français et des dessinateurs chinois. Les premiers albums devraient sortir fin 2007, chez nous et chez d'autres éditeurs. Des projets sont en cours chez Delcourt, avec Jean-David Morvan, avec Olivier Vatine. D'autres sont en cours de gestation. Nous devrions sortir notre premier projet en fin d'année ; il sera scénarisé par un Français et dessiné par un Chinois.

Et c'est facile à mettre en place ?

C'est un petit peu compliqué parce que, pour que les auteurs chinois travaillent bien, il faut faire traduire les scénarii, les storyboards, etc. car ils ne parlent que le chinois. Il y a donc un petit travail de traduction-adaptation à faire. Ca prend du temps de se caler sur l'histoire, sur l'ambiance, etc. Par contre, une fois qu'on est calés, ça roule. Par exemple, pour l'histoire qu'on développe avec Olivier Vatine chez Delcourt, les cinq-six premières pages ont été vraiment laborieuses ; maintenant, ça y est, tout le monde s'est calé, tout le monde comprend ce que veut l'autre, et les pages sortent plus régulièrement, on n'a pas vraiment de soucis. Mais c'est vrai que c'est comme tout projet. Je pense que c'est un peu le même problème pour les couples scénariste/dessinateur qui se mettent en place sur les nouveaux projets, il y a toujours un temps d'adaptation. Là, c'est compliqué du fait de la barrière de la langue, des schémas de pensée, des échelles de valeurs qui ne sont pas les mêmes, effectivement.

Quel public visez-vous avec vos bandes dessinées ?

Je me ne suis pas attaché à un public particulier. J'ai visé un public au-dessus de 9-10 ans. Je n'ai pas encore sorti des titres en dessous, à l'exception de Niumao qui est un album tout public. Globalement, on vise plutôt les 15-25 ans.

Quel est selon vous votre point fort ?

Mélodie d'enferNotre point fort, c'est d'abord une vraie politique d'auteur : prendre soin d'eux, les accompagner dans leurs démarches, les aider, les orienter, et puis surtout, mener à bien les projets avec eux. Il faut savoir que beaucoup d'auteurs en Chine sont extrêmement frustrés parce qu'ils ont des projets, ils ont même parfois des bandes dessinées qui sont complètes, mais qu'ils n'arrivent pas à publier ou qui sont publiées dans de mauvaises conditions.
Pour prendre un exemple précis, Lu Ming avec Mélodie d'enfer : c'est un album qui a été publié en Chine, mais l'éditeur a fait des coupes dans l'album, et n'a pas publié l'intégralité de l'histoire, c'est-à-dire qu'il a réarrangé l'histoire un peu comme il voulait pour en faire un volume de 160-170 pages, alors qu'il y a 250 pages au total. Moi, quand j'ai rencontré Lu Ming, il m'a montré toutes ses planches (il est venu me voir avec la totalité des planches originales). Je lui ai dit « Attends, ton histoire, je publie l'album, je le fais en deux tomes et je publie intégralement. ». Parce que je ne vois pas l'intérêt d'enlever des pages et de le couper, y a rien à couper, je veux dire !
Je crois qu'il y a beaucoup d'auteurs qui sont frustrés parce qu'ils n'arrivent pas à se faire publier ou parce que la qualité d'impression n'est pas bonne. Alors que nous, on soigne la qualité d'impression, on fait attention à ce que ce soient des beaux bouquins et que ce soit bien imprimé. On essaie de soigner les maquettes pour que les auteurs se sentent vraiment valorisés, qu'ils soient vraiment heureux d'avoir été publiés chez nous, qu'ils prennent plaisir à travailler avec nous, et qu'ils aient envie de rester avec nous. On essaie vraiment de faire une bonne politique éditoriale, de montrer des nouveautés. On prend des risques sur beaucoup d'albums. Quelques fois, ça tombe bien, quelques fois, c'est un petit peu plus difficile. Mais notre volonté c'est vraiment ça : montrer cette bande dessinée chinoise et s'attacher à ses dessinateurs en leur proposant des missions, pour pouvoir travailler longtemps ensemble. Parce que je suis persuadé qu'à l'avenir, il y a un véritable potentiel graphique, et qu'il y aura beaucoup de choses qu'on pourra faire avec les auteurs chinois.

My WayQuelle importance portez-vous à la communauté internet qui lit de la bande dessinée ?

Je pense qu'aujourd'hui elle est incontournable. De plus en plus, on communique à travers le web. La preuve en est qu'on vient d'ouvrir le blog de Xiao Pan. On va en ouvrir deux autres, un qui sera lié aux personnages de My Way, monsieur V, et un autre avec Niumao, le chat, qui racontera la vie d'un chat chinois. Mais on essaie de rayonner au maximum. On a beaucoup de partenariats avec des sites web aujourd'hui, et on a un véritable accueil positif de la part des professionnels, des journalistes et des gens qui gèrent les sites web, parce qu'on a une vraie politique éditoriale saine et de promotion de la bande dessinée ; ils cherchent souvent à nous aider. Le web, pour moi, c'est complètement incontournable. Je fais beaucoup plus d'efforts avec les gens qui font du web qu'avec les gens qui font du papier, à l'exception d'un ou deux avec lesquels on a vraiment un fort relationnel, parce qu'ils nous supportent depuis le début. Mais bon, pour moi, l'avenir c'est le web.

Que pensez-vous de l'image de la BD asiatique en France ?

Je pense que l'image de la BD asiatique en France est... J'allais dire "elle n'est pas très bonne", mais ça dépend du public. Autant les jeunes sont enthousiastes, autant les moins jeunes ont plutôt tendance à la dénigrer, voire à la massacrer complètement. Bon, il est vrai qu'il y a, à l'heure actuelle, une invasion de titres qui ne sont pas tous de la meilleure qualité. Ca ne concourt pas à en donner une meilleure image. Je veux dire, la bande dessinée asiatique, il y a des titres absolument excellents et les Japonais font des choses formidables, tant au niveau dessin que du point de vue des histoires. Ce sont de très très grands raconteurs d'histoires, de côté-là c'est vraiment incontournable. Niveau coréen, je sais que ça va être beaucoup plus difficile... Il y a un peu moins de diversité à mon goût. Enfin... il y en a dans le pays, je le sais. Par contre, par rapport à ce qui est publié en France, je pense que pour les Japonais, ils publient énormément de choses... Je regrette un peu que ce qui arrive du Japon en France, c'est surtout ce qui est dans le courant principal. Ils ont beaucoup de dessinateurs qui sont un peu à part et qui sont vraiment très talentueux, mais avec des choses qui sont hors marché, mais qu'on ne voit pas beaucoup en France, parce que les éditeurs de manga aujourd'hui...

... ne prennent pas le temps d'aller les chercher ?

Oui, et puis je pense que les éditeurs de manga aujourd'hui, d'une façon générale, sont partis dans le produit commercial. Ils achètent des droits, comme ils achèteraient n'importe quoi. C'est aussi une des raisons pour lesquelles les Chinois nous ont fait confiance. Sur le marché chinois, on est en concurrence avec Kana, Casterman, Soleil. Ils préfèrent travailler avec nous parce qu'ils savent que s'ils travaillent avec Kana, par exemple, ils n'ont pas cette relation privilégiée qu'ils ont avec nous. Quand ils viennent en France, on les soigne. La plupart du temps, il est rare qu'ils ne viennent pas passer un week-end chez moi. Quand ils viennent à un salon, quelqu'un les accompagne... On leur consacre énormément de temps et d'énergie. Aucun éditeur ne fait ça. Les gros n'ont pas le temps, ils ont autre chose à faire. Ce n'est pas du tout la même vision. Nous avons une vraie relation personnelle avec les auteurs, on s'implique et on essaie vraiment de créer un vrai lien durable.

Ce qui permet aussi de les fidéliser par la suite.

Ce qui permet de les fidéliser, et puis je pense que c'est intéressant pour tout le monde d'avoir une vraie relation de travail et pas avoir tout simplement un gars qui produit les pages.

Comment sont accueillis les manhua en France ?

NiumaoOn a, de façon générale, un très bon accueil. On a commencé avec Angoulême l'année dernière, donc ça fait même pas 18 mois qu'on est sur le marché. On a fait beaucoup de chemin depuis : on a publié 50 titres au jour d'aujourd'hui. On avait commencé avec Benjamin, Nie Jun et Nie Chongrui. Je crois que c'est Benjamin qui a marqué le plus les esprits, mais c'était volontaire, on voulait vraiment commencer avec une BD chinoise qui n'avait aucun point commun avec le manga, donc un album comme Remember, Nie Jun qui a un graphisme qui fait pas du tout manga, un graphisme complètement à part, plus traditionnel. C'était vraiment des choses différentes, et plus ça va, plus on s'installe. Les difficultés qu'on a aujourd'hui, c'est que le marché au niveau des structures de vente s'est un peu coupé en deux : il y a d'un côté les gens qui lisent du manga, que ce soit japonais ou coréen, et de l'autre côté ceux qui font du franco-belge. Il y a aussi un peu les gens qui lisent du comics, mais en fait, ils sont un peu à part. Et nous, on arrive avec des auteurs qui font des petits formats, mais qui font aussi des grands formats, qui font de la couleur et du noir et blanc, et comme on est asiatiques, on nous a mis d'emblée avec le manga.
Alors, finalement, on perd une partie de notre visibilité et il y a des cibles qu'on arrive pas à toucher. L'exemple le plus frappant c'est Niumao : combien de fois je retrouve Niumao dans le rayon manga ? Alors que c'est pas là sa place, sa place c'est à côté d'un Garfield, c'est dans humour. Beaucoup de gens ne se posent plus la question et, comme le marché est noyé aujourd'hui, saturé, les libraires voient arriver mes bouquins, Xiao Pan, c'est du manga, ils ne tiennent pas compte du contenu. On a un vrai problème en ce moment, et on travaille avec nos diffuseurs pour qu'on ait les albums à la bonne place : si on fait des albums qui sont plutôt franco-belges, il faudrait qu'ils soient avec les franco-belges. Par exemple, quand on fait Golden Man, ou une série comme ça, qu'elle soit dans manga, ça le fait pas.

Que chacun soit dans le thème en fait...

Oui sinon, ce qui est difficile, ce qui est dommageable, c'est que si les albums se vendent pas, nous on y gagne pas, mais le libraire non plus, il a quand même intérêt à ce que ça se vende. Cela dit, je comprends aujourd'hui leur démarche. Ils ont 4 000 nouveautés cette année à gérer, ça en fait 20 par jour en moyenne, eux, ils peuvent plus. Alors les petits éditeurs ou les gens qui arrivent avec des nouveautés, on a beaucoup de problèmes à se trouver une place. Et nous, en plus, on a ce problème de positionnement. Moi, j'attends avec impatience que les grands éditeurs commencent à se lancer sur ce marché. Casterman a commencé puisqu'ils ont trois séries en cours, Kana a des gens qui sont au boulot, Soleil aussi. J'attends qu'il y en ait un peu plus, quand on commencera à voir 100 ou 150 titres, on pourra peut-être commencer à faire un petit rayon BD chinoise.

Les éditions Soleil arrêtent leurs collections chinoise et coréenne, ils viennent de l'annoncer.

Ah ? J'étais pas au courant. C'est dommage. Il faut reconnaître qu'il y a quand même une difficulté dont il faut tenir compte, c'est que les Chinois ont depuis de longues années pas tellement l'habitude de s'exporter, d'une façon générale, que ce soit pour la BD ou pour autre chose. Et puis, travailler avec eux, c'est pas de toute simplicité. Autant avec les Japonais, bon y a des contraintes, mais on sait qu'ils savent livrer des images, des bouquins, y a pas de souci. Autant les Chinois, nous, on s'arrache les cheveux, parce qu'on reçoit des images qui ne sont pas bonnes, on reçoit des formats qui sont aplatis. De temps en temps c'est le cauchemar, parce qu'on a jamais le bon matériel, donc c'est vraiment très difficile. Et je pense qu'il y a beaucoup d'éditeurs qui auraient du mal à vraiment travailler avec eux. Y a un autre facteur qui fait que les autres ne vont pas très vite, c'est qu'on est arrivés les premiers, et qu'on a eu une stratégie très offensive pendant la première année. On a essayé de faire signer tous ceux qu'on estimait être les meilleurs auteurs du marché, et aujourd'hui les meilleurs auteurs sont tous chez nous. Effectivement, les autres, quand ils arrivent derrière, il faudrait qu'ils bossent plus, qu'ils s'investissent plus, et aujourd'hui, des gens comme Kana par exemple, ils font leur marché, ils achètent leurs droits, et voilà.

Mais avec le marché chinois comme vous nous l'avez expliqué, c'est pas tellement possible.

Déjà, c'est pas possible, et puis le marché chinois est petit en terme de bande dessinée, y a pas des dizaines de milliers de titres, comme il peut y en avoir des millions au Japon. Moi je dis que s'il sort, allez, 150, même pas, 100 titres chinois, vraiment chinois, par an, c'est le maximum. C'est tout petit. Donc les auteurs, j'en connais la plupart, je dois avoir des projets au moins avec 80-90 % des auteurs qui font aujourd'hui de la BD en Chine, donc c'est vraiment très restreint. Et comme j'ai pris parmi les meilleurs, effectivement les autres ont un peu de mal à faire des choses derrière.

Est-ce que le succès de vos titres aujourd'hui est à la hauteur de vos espérances quand vous avez lancé Xiao Pan ?

Je dirais oui du point de vue de la popularité, de la reconnaissance professionnelle et maintenant au niveau du public, non par rapport aux ventes, parce qu'il y a des albums pour lesquels j'espérais de meilleures ventes. Mais, c'est vrai que, comme on disait tout à l'heure, le marché est saturé et si les gens ne peuvent pas voir nos albums dans les librairies, on a aucune chance de les vendre. Quand on aura commencé à résoudre ce problème-là, ça ira beaucoup mieux. Par contre, du point de vue de la notoriété de la bande dessinée chinoise et de la notoriété de Xiao Pan, oui, on a atteint nos objectifs.

OrangeVous avez récemment ouvert une boutique sur internet. Qu'est-ce qui vous a décidé à le faire ?

Ce qui nous a décidé à le faire, c'est qu'on s'est rendu compte qu'il y avait un premier problème au niveau de la diffusion, parce que quand je faisais des salons, je croisais beaucoup de gens qui me disaient « On arrive pas à trouver vos albums chez notre libraire ». Si on ne les trouve pas chez les libraires, moi je vais les mettre en ligne. Et puis on vend aussi des produits dérivés des albums, donc des affiches et des albums qu'on importe directement de Chine dans des quantités pas suffisantes pour pouvoir les mettre dans un réseau de distribution classique. Donc tous les produits 100 % chinois on va dire, je les mets sur le site. On vend aussi des originaux. On a un site qui est relativement complet, et on ne cherche pas à faire concurrence aux libraires, mais on cherche à pallier les trous, parce que bon aujourd'hui ce n'est pas normal que sur le site web je vende des albums comme Remember ou Orange.

C'est peut-être des gens qui préfèrent acheter sur internet, ou qui préfèrent acheter directement chez vous plutôt que via un libraire.

Y a ça aussi. Il y a les gens qui ont le réflexe. Mais je pense que c'est surtout des gens qui ne les trouvent pas. Ou alors ils les commandent chez nous parce qu'ils achètent aussi autre chose, des cartes postales, des ex-libris, des affiches, etc. C'est aussi ça qui les attire. On a des produits qu'on vend sur les salons comme aujourd'hui, qu'on ne vend aussi que sur le site et qu'on ne peut pas trouver ailleurs.

Du coup ça marche bien, vous êtes contents ?

Moi je suis très content. On est tout petit, mais le premier mois où on a ouvert, on a pris 50 commandes, donc franchement c'est très bien. De toute façon, je n'ai pas besoin de 3 000 commandes, je ne saurais pas les gérer, donc ça ne m'intéresse pas. Mais ça fait aussi parler de nous, ça fait aussi des gens qui viennent sur le site, qui vont sur la boutique pour voir ce qu'on fait, et y a des produits qu'on ne trouvera nulle part ailleurs.

Pour la dernière question, y en a pas en fait. C'est le mot de la fin, donc si vous avez quelque chose à rajouter, une question que je ne vous ai pas posée, quelque chose que vous voulez dire en plus...

Je pense qu'on a dit l'essentiel. Moi, je crois très fort à l'émergence du marché chinois. Il faut savoir que je travaille aussi dans l'autre sens, de la France vers la Chine. J'ai monté un festival à Pékin il y a deux ans avec des dessinateurs français, et depuis je travaille avec des partenaires français installés en Chine pour pouvoir proposer aux éditeurs franco-belges une véritable solution de distribution et de diffusion de bandes dessinées françaises traduites en chinois sur le marché chinois. Je travaille vraiment dans les deux sens.

Eh bien, merci beaucoup de nous avoir accordé du temps.

Merci à vous.

Yadana

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